Contrat de franchise et prix de revente aux consommateurs

Posté par: Franchising Belgium

Maître Marie Canivet, CMS DeBacker

Le contrat de franchise doit préciser quels produits ou services seront distribués et, le cas échéant, si le franchisé peut disposer d’une certaine marge de liberté à cet égard.

Lorsque le franchisé est propriétaire de son stock (full franchisé, locataire-gérant, commissionnaire-affilié lorsque ce dernier est propriétaire de son stock), le franchiseur ne peut lui imposer des prix de revente.

En effet, le droit européen et belge de la concurrence proscrivent les accords verticaux restreignant la capacité de l’acheteur de déterminer son prix de vente[1].

Il est donc interdit au franchiseur d’imposer au full franchisé, au locataire-gérant ou au commissionnaire-affilié (propriétaire de son stock) des prix de revente. Cette liberté de fixer des prix de vente doit être réelle et effective en pratique[2]. Il a ainsi été jugé qu’un contrat de franchise était nul au motif que les imprimés publicitaires préparés par le franchiseur à destination de la clientèle passaient sous silence l’existence de conditions de vente particulières auprès de certains franchisés du réseau[3]. De la même manière, un contrat de franchise a été annulé au motif que les prix de revente étaient mis à jour par le franchiseur via ses propres serveurs informatiques sans possibilité technique pour le franchisé de modifier ces prix transférés tels quels dans les caisses du magasin[4].

En revanche, il est permis au franchiseur d’imposer des prix de revente maximaux et également de recommander des prix de revente à condition que ces derniers n’équivaillent pas à un prix de revente fixe ou minimal sous l’effet des pressions exercées par l’une des parties[5].

Il est également permis au franchiseur d’imposer des prix de revente dans trois cas[6] :

  • Dans le cadre d’actions promotionnelles au sein du réseau d’une durée limitée. La Commission considère en effet que « des prix de vente imposés, et pas seulement des prix de vente maximaux, peuvent être nécessaires pour organiser, dans le cadre d’un système de franchise ou d’un système de distribution similaire appliquant un format de distribution uniforme, une campagne de prix bas coordonnée de courte durée (2 à 6 semaines le plus souvent) qui profitera également aux consommateurs » ;
  • Dans le cadre du lancement d’un nouveau produit : « lorsqu’un fabricant lance un nouveau produit, les prix de vente imposés peuvent notamment être utiles, pendant la période d’introduction au cours de laquelle la demande croît, pour inciter les distributeurs à mieux tenir compte de l’intérêt du fabricant à promouvoir le produit en question. Les prix imposés peuvent permettre aux distributeurs d’augmenter les efforts de vente et, si les distributeurs sur ce marché sont soumis à des pressions concurrentielles, les inciter à développer la demande globale pour le produit et à faire de ce lancement un succès, dans l’intérêt des consommateurs également[7]. »
  • En vue de permettre la fourniture de services additionnels de prévente : « parfois, la marge supplémentaire offerte par les prix de vente imposés peut permettre aux détaillants de fournir des services de prévente (additionnels), notamment dans le cas de produits d’expérience ou complexes. Si un nombre suffisant de clients s’appuient sur ces services pour faire leur choix, mais achètent ensuite les produits à un prix plus bas à des détaillants qui ne fournissent pas ces services (et, de ce fait, n’en supportent pas les coûts), les détaillants offrant un haut niveau de service peuvent réduire ou supprimer ces services qui augmentent la demande pour le produit du fournisseur. Les prix de vente imposés peuvent contribuer à prévenir un tel parasitisme au niveau de la distribution. Les parties devront démontrer à suffisance qu’il peut être attendu des prix de vente imposés que non seulement ils donnent les moyens de surmonter un éventuel parasitisme entre les détaillants sur ces services, mais aussi qu’ils incitent à le faire, et que les services de prévente profitent globalement aux consommateurs, comme élément de la démonstration du respect de toutes les conditions énoncées à l’article 101, paragraphe 3. »

S’agissant du commissionnaire-affilié (dont le stock est la propriété du franchiseur) et du gérant libre, ces derniers n’étant pas propriétaires du stock qu’ils vendent pour le compte du franchiseur, ils peuvent se voir imposer, en tout temps, des prix de revente par le franchiseur.

 

[1] Il s’agit d’une restriction caractérisée qui entrainerait la nullité du contrat de franchise : Règlement 330/2010

[2] P. DEMOLIN et V. DEMOLIN, Le contrat de franchise – Les règles juridiques applicables au contrat de franchise en Belgique – Analyse et commentaires de quinze années de jurisprudence 1995-2010, Dossiers du JT, Larcier, Bruxelles, 2011, n°203 et s.

[3] Prés. Comm. Bruxelles, 4 juin 1997, inédit, R.G.n°97/97

[4] Comm. Bruxelles, 17ème ch., 26 novembre 2009, inédit, R.G. n°A/09/02596.

[5] Lignes Directrices, point 48 concernant des restrictions indirectes

[6] Lignes Directrices, point 225

[7]En supposant que le fournisseur n’ait pas la possibilité en pratique d’imposer à tous les acheteurs, par voie de contrat, des obligations de promotion effective; voir aussi le point (107), a).

Maître Marie Canivet
Avocat CMS DeBacker